Posts tagged ‘culte’

La ballade de l’impossible – Haruki Murakami


Ce n’est que le deuxième livre de Murakami que je lis (après le fabuleux Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil ) mais ses autres bouquins se trouvent désormais sur ma liste virtuelle de mes prochaines lectures.

Watanabé est un étudiant un tantinet asocial qui tombe amoureux de l’ex de son ami qui s’est suicidé un an avant de rentrer à l’université. Ca n’a pas l’air passionnant comme ça et cela ne l’est pas. La force de l’écriture de Murakami réside plus dans le plaisir de la lecture que dans la quête de ses personnages. Le voyage est plus important que la destination.

Je n’ai pas la prétention d’expliquer l’oeuvre de Murakami. Comme dans Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil, le personnage principal (le roman est écrit à la première personne) semble se débattre dans une bulle de verre. La vie se déroule sur un écran qu’il peut toucher mais qui n’a aucun relief. La distance exprimée par Watanabé envers le monde qui l’entoure (le Japon de la fin des années 60, ses amours, les livres, la politique, …) rend paradoxalement plus facile au lecteur la tâche de comprendre l’étrange torpeur qui percole à travers tout le roman.

Murakami réussit le tour de force d’écrire un roman à la fois accessible et profond. Son style est fluide et ses personnages sont attachants malgré la distance qu’ils entretiennent avec la réalité.

Une lecture agréable et apaisante.

28 Mai 2010 at 11:07 Laisser un commentaire

Sukkwan Island – David Vann


Un dentiste convainc son fils de 13 ans de passer un an avec lui dans une cabane perdue au fin fond de l’Alaska.  Sur cette trame légère, David Vann construit une intrigue solide et étouffante dans un décors sauvage qui souligne la solitude des personnages.
Ce livre plongera dans un abîme de perplexité tout lecteur souffrant de troubles obsessionnels du comportement qui le pousse à classer ses livres exclusivement par catégories. Sukkwan Island navigue avec beaucoup de bonheur entre les genres. C’est à la fois une réflexion sur la complexité des relations père-fils, un huis-clos et un thriller. En effet, la construction du roman pivote autour d’un moment clef qui prend le lecteur à contrepied surprendra tout amateur de sensations fortes. L’auteur installe également une atmosphère pesante qui tiendra en haleine les lecteurs les plus exigeants.
Une anecdote: je lisais avec avidité lorsqu’une phrase me frappa tellement que je cru avoir mal lu. J’ai relu le paragraphe pour m’assurer que j’avais bien lu. Ce coup de théâtre est un vrai coup de maître. Une seule phrase d’à peine quelques mots retourne complètement le sens du roman sans bouleverser la cohérence du récit. J’ai rencontré le procédé de temps à autre au cinéma mais jamais avec un tel bonheur dans un livre.

Le style nerveux de David Vann contribue au plaisir de la lecture. Les dialogues ne se distinguent jamais du reste du texte comme l’usage le prescrit: aucun tiret, aucun guillemet, pas d’italique. Juste le texte dans sa nudité brutale. Si le procédé m’a effrayé dans les premières pages, il s’avère très efficace pour pénétrer la profondeur des deux protagonistes.On ne peut s’empêcher de penser à Into the wild de Jon Krakauer (que je n’ai pas lu mais dont j’ai adoré l’adaption de Sean Penn au cinéma) et à La route de Cormac McCarthy(dont j’ai vainement tenté à deux reprises de passer le cap des 40 pages) auxquel Sukkwan Island fait immanquablement écho. Toutefois, la tension et la folie qui percolent à chaque page rendent ce roman plus saisissant.

Une belle idée de cadeau. Je regrette le peu de couverture médiatique qu’il suscite.

20 avril 2010 at 14:18 Laisser un commentaire

Il faut qu’on parle de Kevin – Lionel Shriver


Ne vous fiez pas à la tristesse de la couverture

A l’entame de ce billet, je me rend compte que je manque de vocabulaire pour qualifier ce bouquin. Excellent? Pas seulement. Dur? Difficile? Dérangeant? Palpitant? Je pense que mon choix va se porter sur l’ambivalent « terrible ».

On connait d’emblée la fin de l’histoire. Eva écrit à son mari dont elle est séparée pour lui faire part de ses état d’âme depuis que leur fils de 16 ans a tué 10 de ses condisciples à l’école. Le choix de la correspondance à sens unique (seule Eva y participe) développe une dimension excessivement intime à ses propos.  cela accentue l’horreur de ses révélations mais cela permet également de briser nombre de tabous en décrivant le désarroi d’une mère confrontée à un enfant qu’elle pressent foncièrement malfaisant dès sa naissance. On ne peut réduire ce livre à une complainte d’une maman terrifiée par sa progéniture ni au cheminement d’un gamin mauvais. Shriver décrit par ailleurs fort bien une société américaine en décalage avec le reste du monde. Un pays en perte de repères dont sa jeunesse peine à briser le rideau de superficialité pour donner un sens à  son avenir.

Je dois dire que, bien qu’emballé par l’écriture de Shriver dès les premières lignes, j’éprouvais un malaise presque physique à lire les lettre d’Eva. Principalement dans la première partie du bouquin où je n’avais pas encore pris toute la mesure du drame vécu par les parents de Kevin. Chaque lettre d’Eva était une épreuve que j’avais peur d’entamer mais dont je ne pouvais me soustraire. Les malheurs d’Eva me revenaient sans cesse dans mon quotidien. On ne peut s’empêcher de s’identifier à elle et de se demander ce qu’on aurait fait à sa place. Dans ma jeunesse, je dévorais les livres de Stephen King, Peter Straub ou Dean Koontz. J’en aimais le style délié et leur approche du mal que je jugeais moins caricaturale que les « mauvais » qui hantaient les films d’action de l’époque (ça doit encore être le cas). Ici, Shriver donne une vraie dimension littéraire au mal. Kevin est un damné qui ne croit en rien, n’espère rien, ne veut rien. Il incarne le mal. Mais ce n’est pourtant pas de là que provient le malaise. Le pire est dans la solitude de sa mère (dont nous partageons l’intimité) qui est la seule a deviner la profondeur malfaisante de son fils. Ce n’est pas un livre d’horreur, c’est une histoire horrible. C’est superbement écrit (Shriver entre dans mon panthéon personnel) et c’est un roman auquel il est difficile de rester indifférent.

Ne vous laissez pas rebuter par la noirceur de mes propos. « Il faut qu’on parle de Kevin » est un livre essentiel qui donne un éclairage nouveau sur le fait d’être parent, sur la société moderne et sur le déni culturel envers le mal inné.

Voici, pour quelques euros, la preuve qu’un livre est plus qu’un divertissement. Voici le genre de bouquin qui donne un sens à ce blog que j’ai entamé pour partager mes coups de coeurs et mes coups de gueule. Voici une évidence. Une vraie baffe que je recommande à tous ceux qui n’attendent pas famille (ça pourrait plomber l’ambiance ;-))

22 décembre 2009 at 12:08 5 commentaires

Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil – Haruki Murakami


Indispensable à votre bibliothèque

Indispensable à votre bibliothèque

Quel beau livre! Je me retrouve un peu idiot à poser un commentaire forcément insignifiant par rapport à l’écriture de Murakami.

C’est le genre de bouquin qui me fait plaindre les gens qui ont décrété qu’ils n’aimaient pas lire ou qu’il n’en avaient jamais le temps. Comment peut-on se priver d’une telle gourmandise? Deux cents pages de pur bonheur.

Voilà un roman où il ne se passe quasiment rien. L’intrigue se résume à un trentenaire qui retrouve une amie d’enfance dont il était amoureux. Pas forcément un sujet fascinant. Je ne pense pas que je l’aurais lu si une amie ne me l’avait offert. Et pourtant, l’écriture pleine de simplicité de Murakami transcende l’intrigue et nous laisse groggy à chaque fin de chapitre.

Je ne connais rien au Jazz et Murakami donne plusieurs clefs pour souligner le parallélisme de son texte avec un air de Jazz. Bien que je ne connaisse rien à ce style musical, j’ai très vite senti un rythme particulier qui me rappelait un vieil air de blues. L’auteur joue des phrase comme un vieux bluesman de sa guitare. Un style à la fois syncopé et mélancolique qui emporte le lecteur dans un tourbillon de sentiments.

C’est également un roman très masculin. Au sens où les doutes, les peurs et les envies du narrateurs sonnent toujours juste. Pour une fois l’homme n’est pas décrit comme une héros (machoire carrée, larges épaule, sûr de lui, …) ou un lâche (épaules tombantes, regard fuyant, chétif, …) mais comme un être humain avec ses forces et ses faiblesses.

Un dernier point plus anecdotique m’a frappé. L’intrigue se déroule au Japon et le texte est écrit par un Japonais mais l’ensemble parait tellement universel qu’à quelques détails près, cela pourrait se passer à Bruxelles ou à Lyon. On est très loin des stéréotypes asiatiques.

Magnifique.

Que ceux qui n’ont pas encore lu ce livre nous quittent pour venir nous en parler après l’avoir lu. Pour les autres, j’aimerais connaître votre sentiment sur la réalité de l’existence de Shimamoto-San. Est-elle la maîtresse retrouvée ou est-elle l’incarnation des regrets et des remords de Hajime? Je n’arrive pas à me décider.

13 Mai 2009 at 10:04 6 commentaires

Flight of the Conchords


Ca vaut le coup d’apprendre l’anglais.

23 avril 2009 at 19:11 Laisser un commentaire

Die Welle – La Vague


Un film à voir et à faire voir

Un film à voir et à faire voir

En Allemagne, un professeur vaguement anar et rock ‘n roll (le genre de prof que ses élèves tutoient) se voit confier à contrecœur d’exposer les tenants et aboutissants de l’autocratie à une classe de terminale secondaire. Très vite, il se retrouve confronté à des étudiants lassés de s’entendre parler des nazis et des dictateurs. Pour eux, ils sont trop au courant, trop alertés pour qu’une telle abomination se reproduise aujourd’hui. Le professeur change de méthode et instille une nouvelle discipline et un esprit de groupe qui va souder sa classe.

Cette fiction dramatique dépeint sans jamais lasser le spectateur les mécanismes du fascisme. Ses bienfaits pour le groupe (cohésion, élimination des différences, soutien mutuel, signes de reconnaissance, …) sont au prix du rejet des personnes ne faisant pas partie du groupe ou ne partageant pas l’intégralité de ses valeurs. La dynamique mise en place par le professeur lui échappe petit à petit pour aboutir à la dépersonnification des élèves au profit du groupe.

A mon avis il serait dommage de réduire le message du film au seul fascisme politique. La dynamique pourrait s’appliquer à tous les groupes qui basent leur cohésion sur l’identité. Les supporters,  les fans qui suivent leurs idôles, les religieux qui confondent codes et rites spirituels peuvent tout à fait se retrouver victime des mêmes dérapages. La force du film est de ne jamais aborder le sujet sous le seul angle politique ou historique.

Saisissant et essentiel. Je vous invite tous à voir et à faire voir ce film.

Par parenthèse, je trouve triste qu’on nous matraque avec la promotion de films insipides (Coco, Indiana Jones 4, Safari, Slumdog Millionaire, Milk, Watchmen, …. la liste ne s’arrêtera pas) et qu’on passe à côté d’un tel bijou.

8 avril 2009 at 15:40 Laisser un commentaire

Die Apokalyptischen Reiter – Have a nice trip


Un autre coup de coeur musical. Un autre groupe totalement inconnu chez nous.

Ces allemands n’en sont pas à leur coup d’essai puisque leur discographie compte déjà pas moins de 9 albums. On ne peut s’empêcher de penser à Rammstein mais ce ne serait pas leur rendre justice  de réduire leur musique à un genre ou à une copie d’un groupe plus célèbre. En toute honnêteté, j’ai beaucoup de mal à comprendre comment il est possible que deux groupes originaires du même pays, chantant tous les deux en allemand et ayant une telle richesse artistique soient traité de manière aussi dissemblable par la presse spécialisée. vaut vraiment la peine d’être découvert.

Je n’ai jusqu’ici écouté que Have a Nice Trip mais sa richesse musicale donne envie de goûter les autres. Je ne compte pas égréner tous les titres mais sachez que tous ont une empreinte musicale très marquée. S’ils partagent avec Rammstein les racines de Métal Industriel, les teintes données varient selon le thème du texte.  Lolita a une composante latino alors que le riff de Fatima est d’inspiration orientale. Das Paradies est une merveille qui dont le plaisir s’amplifie à chaque écoute.

A noter, en bonus track, une reprise d’une chanson de Manowar que je ne connaissais pas: Master of the Wind qui est d’une puissance époustouflante. J’ai pris la peine d’écouter la version originale qui m’a paru d’une platitude incroyable par rapport à la reprise qui est un véritable bijoux. Comme quoi l’interprètation peut transcender une oeuvre. Grandiose.

A découvrir absolument.

21 février 2009 at 11:28 Laisser un commentaire

Volbeat – Guitar Gangsters & Cadillac Blood


C’est un vrai coup de cœur. Je ne parle pas souvent de musique car je pense que les dégouts et les valeurs ne se discutent pas. Toutefois, j’aime faire une exception pour des albums ou des groupes qui sont parfaitement inconnus et qui méritent une mise en lumière.

Lorsque j’étais beaucoup plus jeune, je pouvais passer des heures devant MTV pour espérer voir le dernier clip de Guns ‘n Roses ou le dernier Bon Jovi. C’était à l’époque la seule façon de découvrir des nouveaux sons. Quel bonheur d’entendre 18 and life par un Skid Row totalement inconnu. Maintenant, MTV ne passe plus de musique et c’est tant mieux. Ca leur permet de passer des essais sociologique sur des adolescents siliconé et/ou musculeux et aux dents blanches. Je me demande ce que pensent les extra-terrestres qui ne reçoivent que le signal de MTV.

Bref.

C’est sur le net que j’ai découvert Volbeat dans une critique dithyrambique de l’excellent site Nightfall. L’article conjugué au titre de l’album m’a incité à l’écouter et … ouah. je manque de vocabulaire pour décrire une telle claque! Prenez la rythmique de Metallica et appliquez-là au rockabilly pour accompagner un chant fort et clair. Mixez le tout au Danemark et vous avez ce bijoux pleins de surprises. Toutes les chansons sont assez courtes et vont directement à l’essentiel. Les amateur de R’n’B ou de Michel Sardou risquent d’être un brin décontenancés mais l’expérience vaut tout de même le coup d’être vécue.

Je savais la scène rock scandinave est extrêmement fertile mais elle ne cesse de me surprendre. Comment est-il possible que Opeth et Volbeat ne soient pas plus connus chez nous? Pourquoi les médias nous abreuvent-ils du dernier Johnny ou du dernier U2 qui connaîtront de toute manière un succès commercial immense alors que rien n’est fait pour faire émerger les nouveaux talents? On me dit que les maisons de disques prennent des bénéfices plantureux pour faire connaître de nouveaux talents. Ils n’ont pas fini de se foutre de notre gueule.

3 février 2009 at 12:48 Laisser un commentaire

Millenium – Tome 3 – La reine dans le palais des courants d’air – Stieg Larsson


La reine dans le palais des courants dair
La reine dans le palais des courants d’air

On a déjà tout dit sur ce triptyque. Trois romans à suspense écrit par un journaliste suédois engagé mort quelques jours après avoir remis le dernier manuscrit. Quasiment 1700 pages qu’on dévore sans répit.

D’après moi, le succès tient non seulement au sujet parfaitement maîtrisé mais aussi aux personnages très originaux qui sont tous bien développés. La mort de Stieg Larsson nous prive de Mikael Blomkvist et Lisbeth Salander qui auraient pu encore nous faire vibrer pendant bien d’autres mésaventures. On aime aussi l’exotisme que représente pour nous la Suède et son contexte historique et politique. Cela change des thrillers habituels beaucoup trop souvent situés de l’autre côté de l’Atlantique.

Il y a en fait deux romans. Le premier tome est une histoire qui revisite le thème de la chambre close alors que les deux derniers forment un bloc unique qui s’étend sur plus de 1000 pages et qui dévoile un vaste complot au sommet de l’état en impliquant les services secrets.

Le style est très maîtrisé même si on se lasse de quelques tics d’écritures au bout des trois briques. On sent aussi que l’auteur aurait aimé être Mikael Blomkvist. Le héros partage beaucoup de la biographie de Stieg Larson et la bienveillance qu’il éprouve envers les petits travers et la loyauté qui confine à la psychorigidité de Blomkvist doit avoir un écho personnel pour l’auteur.

Enfin, personnellement, j’ai aimé le fait que Stieg Larsson prenne le temps de se documenter sur les aspects informatiques qui occupent une place importante dans les trois tomes. Pour une fois, le lecteur n’est pas pris pour un idiot et, sans noyer le récit dans des détails assommants, il reste dans le domaine du techniquement  plausible. C’est suffisamment rare pour être souligné. Rien ne m’énerve plus que les fictions qui nous baratinent de termes techniques qui n’ont aucun sens dans le contexte où ils sont exprimés.

Je conseille à tous de se jeter sur ces livres. Pour une fois, le succès est mérité et ne relève pas d’un buzz marketing bien construit mais sur un bouche à oreille flatteur. Cela prouve que les éditeurs auraient tout à gagner à prendre la peine de tenir à l’oeil les succès littéraires des pays qui ne font pas partie de la sphère anglo-saxonne.

29 janvier 2009 at 12:48 Laisser un commentaire

Je vais bien, ne t’en fais pas


C’est à contrecœur que j’ai entamé ce film. Les films français ayant un titre étrange relatant les tribulations de trentenaires aisés foisonnent depuis quelques années. Si vous voulez vous faire une idée de ce que j’avance, je ne saurais trop vous conseiller l’exécrable Un baiser s’il vous plait. Bref, entre comédies lourdingues et marivaudages insipides, le cinéma français me laisse souvent froid.

Cela étant écrit, deux des meilleurs films que j’ai vu récemment sont français. Ils sont aussi très atypiques. Le premier est le merveilleux La graine et le mulet. Le second est affublé d’un titre encore plus cryptique.

Je vais bien, ne t’en fais pas raconte l’histoire d’une jeune fille dont le jumeau a disparu. On sent très vite le malaise des parents à évoquer sa disparition. Vient ensuite le refus et la colère. La jeune fille devra être hospitalisée car elle refuse de s’alimenter. Jusqu’au jour où elle reçoit une carte de son frère: « Je vais bien, ne t’en fais pas ».

Je suis parfois surpris du ton théatral des acteurs français qui préfèrent surjouer une scène pour palier les carences du scénario. Ici, la réalisation d’une sobriété en accord avec la gravité du sujet met en valeur la justesse de leur jeu. Le moindre second rôle est ancré dans la réalité. Une quotidien un peu médiocre de banlieusards perdus dans des lotissements sans âmes où la vie est rythmée par des émissions de télévision insipides.

Le film traite habilement de la difficulté de communication entre parents et enfants. Les non-dits remplacent les silences. Pourtant, petit à petit, l’histoire dévoile que derrières ces silences se dissimulent un amour immense. Bien que traitant d’un sujet difficile, le film entretient une tension grâce à l’omniprésence (!) du frère et du mystère entourant son absence (Que lui est-il arrivé? Où est-il? Pourquoi cette haine envers son père? Pourquoi n’appelle-t-il pas sa sœur?).

Un très grand film.

3 janvier 2009 at 11:04 4 commentaires

Assassin Royal – Robin Hobb


C’est toujours avec un sourire teinté de mélancolie que je referme un tome de la saga de FitzChevalerie, l’homme lige du roi Subtil, Bâtard de Chevalerie élevé par Burrich et Umbre. Que ce charabia ne vous détourne pas des aventures merveilleuses écrites par Robin Hobb. Il s’agit d’une longue série d’épisodes (à la manière d’Alexandre Dumas) qui reprennent la vie d’un enfant abandonné qui se révèle avoir du sang royal. Il est élevé comme garçon d’écurie mais les joutes politiques et les menaces externes (les pirates rouges) font qu’il se voit former comme assassin pour le roi.

Les nombreuses intrigues connexes et les personnages complexes sont à l’origine de la mélancolie que j’ai mentionné plus tôt. On s’attache tellement à leurs destins que les quitter ne fût-ce qu’un temps est comme faire ses adieux à un ami qu’on ne reverra pas avant un moment.

Ce conte d’heroic fantasy puise dans tout l’imaginaire des sagas modernes. Je pense notamment au Seigneur des Anneaux (pour l’ancrage dans un univers médiéval) mais aussi à Star Wars (dont l’histoire est manifestement inspirée). Je ne saurais trop conseiller à tous de suivre Fitz dans ses aventures. Pour ceux que l’Heroic Fantasy rebute (j’en faisais partie), cette série est sans doute la plus abordable. Pour ne rien gâcher, elle est fort bien écrite. Absolument recommandable à tout âge.

23 décembre 2008 at 10:56 1 commentaire

Basic Instinct – Paul Verhoeven


Basic Instinct de Verhoeven est un chef-d’oeuvre subversif. Ce n’est pas un coming out, c’est un constat que je veux faire partager. La plupart n’ont retenu que la publicité faite autour des atours peu farouches de la blonde de service mais la subtilité du film tient dans sa réalisation.

Alors que le scénario est d’un profond crétinisme et que les acteurs ont un jeu qui ne provoquerait qu’un sourire condescendant de la part de Mimi Mathy, le réalisateur a eu le génie de pousser les contrastes stylistiques à la limite de la parodie. Le résultat me fait penser à un tableau en trompe-l’oeil ou à un classique d’Agatha Christie. Tout parait évident lorsqu’on sait à quoi faire attention.

Passez outre vos a priori et revoyez ce chef d’œuvre en prenant attention aux gros plans (la main qui frappe à la porte), les mâchoires serrées de Michael Douglas, les plans empruntés aux séries télévisées, les voitures filmées comme des publicités… Le tout est scrupuleusement souligné par une musique pompeuse et sans subtilité. Je ne peux pas croire que le réalisateur ait accumulé autant de clichés sans intention. Au contraire, il a du recevoir une commande pour un polar érotico-chic (genre très en vogue à l’époque) et l’a insidieusement transformé en parodie tout en s’assurant de concevoir un film correspondant au cahier de charge. Il a du être un brin dépité que le film ait eu un tel succès après les révélations concernant les habitudes vestimentaires de Sharon Stone.

A revoir.

24 novembre 2008 at 09:28 Laisser un commentaire

American darling – Russel Banks


Russel Banks use du procédé de la biographie fictive pour développer ses sujets. Ce roman est d’une densité étonnante. L’héroïne décide de quitter son existence confortable d’une ferme prospère pour retrouver ses fils au Libéria. Derrière ce scénario lapidaire se dissimule une foison de thèmes tous exploité avec aisance grâce notamment  à  un style fluide et rythmé.

Le Libéria, qui sert de toile de fond à toute l’intrigue, est en soi un sujet de roman. Ce pays africain a été construit de toute pièce comme une colonie à l’envers: au début du 19ème siècle, les américains trouvant qu’il y avait de plus en plus de noirs libres dans les grandes villes ont favorisé le retour au pays de plusieurs ressortissant d’origine africaine. Sauf qu’ils étaient américains et que personne n’a demandé aux indigènes leur avis lors de cette « colonisation ». Les libériens d’origine américaines ont fondé une expèce d’ethnie supérieure qui s’est mise à exploiter les indigènes et à adopter le mode de vie américain du début du 19ème siècle. Un fouet reste un fouet quelle que soit la couleur de la main qui le tient.

C’est dans ce contexte qu’une ex-militante américaine d’extrême gauche (!) voit le pays glisser de l’exploitation et la corruption vers un chaos sanglant.

Le livre évoque tant de thèmes qu’il est difficile de tous les énumérer mais, à mon sens, le constat que l’auteur pose en filigrane est que nous sommes tous les architectes de nos tragédies. La profondeur de l’écriture donne corps à un roman tragique et passionnant.

Un très beau cadeau.

19 novembre 2008 at 13:59 Laisser un commentaire

Je n’aime pas ce garçon


… parce que son talent me rend jaloux.

Ce gamin a à peine 17 ans et cela fait près de deux ans qu’il poste régulièrement ses exploits musicaux sur Youtube. Sa dextérité est époustouflante. J’espère juste que son talent ne sera pas gâché par la médiocrité de la scène rock française. En effet, hors de la variété (typiquement française) et de la chanson à texte, rien ne semble émerger en France depuis des années. Seul Téléphone avait réussi à percer le mur constitué par les dinosaures de la chanson française (Souchon, Cabrel, Goldman, … on les connait mieux sous le vocable « enfoirés »). Il y a quelques surprises comme les Rita Mitsuko et quelques rappeurs mais qu’un tel prodige apparaisse sur un espace musical aussi dévasté est plutôt rassurant.

Il se nomme Mattrach

14 novembre 2008 at 12:16 1 commentaire

Les monologues voilés – Adelheid Roosen


Suite au succés des monologues du vagin, l’auteure néerlandaise a voulu porter l’éclairage sur la sexualité de la femme musulmane. Elle a interviewé des femmes originaires d’un pays musulman (Algérie, Iran, Maroc, Somalie, Turquie, Irak, …) et vivant aux Pays-Bas.

Le résultat de ces entretiens donne un ensemble de textes parfois tragiques, parfois drôles et toujours poignants. Malgré le sujet très féminin et très identitaire, on ne se sent jamais largué par des sujets qui auraient pu nous laisser indifférents. J’ai beaucoup apprécié le discours féministe qui ne se résume jamais à une confrontation de genres.

Les textes ciselés sont portés avec gourmandise et intensités par quatres actrices elles-même de culture musulmane. Un très beau spectacle.

10 novembre 2008 at 10:10 Laisser un commentaire

Les Sopranos


C’est avec un peu de mélancolie que j’ai regardé le dernier épisode de la dernière saison des Sopranos. Pour ceux qui ont la chance de ne pas encore la connaître (et donc le bonheur de la découvrir), c’est une série qui narre l’évolution d’un boss de la mafia du New Jersey qui décide d’aller voir un psy pour soigner ses crises de panique. Je ne sais pas si Mafia Blues (Analyze this) est antérieur ou postérieur (puisque le thème est honteusement proche) mais, de toute manière, ce n’est pas le principal. Ce pitch n’est qu’un prétexte. A travers l’entourage d’Anthony Soprano, c’est toute la société contemporaine qui est dépeinte.

Si la première saison suit de près l’idée de base (boss de la mafia sous prozac), la suite est beaucoup plus profonde. Chaque épisode évoque un thème avec une subtilité fascinante. Cela parle aussi bien des parents angoissés par l’avenir de leurs enfants, de la religion, de l’homosexualité, de la palce de l’homme, de l’amitié, de la confiance, de la place de la femme, de l’addiction au jeu, de la fidélité, etc … La mise en scène, toujours irréprochable, alliées à de tels scénarios et d’acteurs aussi justes font de chaque épisode un condensé d’émotion que peu de films atteignent.

Un vrai bijou à ne pas manquer. Si vous êtes allergiques aux maffieux, essayer d’aller au delà de la première saison.

27 septembre 2008 at 11:16 1 commentaire

Page sportive


La page sportive du journal télévisé ce soir à la RTBF valait le détour.

Deux sujets.

Les matches truqués de St Trond.

Lance Armstrong reprend la compétition cycliste et s’alignera sur le tour de France 2009.

Sans commentaire.

24 septembre 2008 at 22:30 1 commentaire

La graine et le mulet


Voilà un véritable OVNI. Je ne l’aurais sans doute jamais regardé sans le bouche a oreille et ç’aurait été une grave erreur. Malgré qu’il n’y ait pas un seul acteur connu, un sujet fort léger et un budget manifestement très limité, on nous offre un film inoubliable. C’est à la fois tragique et léger, drôle et poignant, rythmé et contemplatif, banal et universel. Dans le milieu de la communauté arabe d’une ville du sud de la France, un ouvrier de 61 viré du chantier naval où il a toujours travaillé va utiliser ses indemnités de licenciement pour ouvrir un restaurant afin de laisser quelque chose à ses enfants.

Au delà de la qualité du scénario, ce qui est remarquable, c’est la qualité extraordinaire des acteurs. Tous des inconnus mais une présence et un jeu époustouflant. Lorsqu’on compare avec les acteurs « officiels » du cinéma français, on se demande s’il ne faudrait pas revoir les méthodes d’enseignements des grandes écoles d’acteurs. Le film est tourné caméra à l’épaule et suit les personnages dans le style documentaire qu’a popularisé l’émission Strip Tease et le naturel des acteurs rend le procédé vraiment transparent.

Remarquable! Ne le manquez surtout pas!

23 septembre 2008 at 08:28 1 commentaire

Imperium – Robert Harris


Absolument passionnant.

Robert Harris a écrit plusieurs romans baignants dans un contexte historique sans être des romans historiques. Ses deux derniers livres suivent une  trame différente. Il s’attache a évoquer un évènement ou un personnage de la Rome antique en suivant d’aussi près que possible la réalité historique. Pour imposer un rythme à son roman, il décrit les évènements à travers les yeux d’un personnage secondaire. Cette technique lui permet quelques libertés avec l’histoire officielle et distingue son roman d’un essai historique.

C’est fascinant de voir à quel point la politique a peu changé en 21 siècles. Je suis un béotien complet en ce qui concerne la Rome antique. Je n’en connais en gros que les poncifs habituels (César et Cléopâtre, Astérix et la série Rome). Robert Harris fait vraiment oeuvre louable en relatant des extraits significatifs de cette période (son précédent roman retraçait la catastrophe de Pompéï). Cicéron est un fameux personnage de roman. Sa vie est une vraie tragédie au sens littéral du terme: le pouvoir, les intrigues, les trahisons, la vulgarité, … tout s’y trouve.

Cicéron est le produit de son époque mais il façonne également la politique d’une manière telle que nous en ressentons encore les effets aujourd’hui. Il y a vraiment très peu de points commun entre la démocratie romaine de cette époque et celle qui nous est familière aujourd’hui. Mais l’intérêt de cette période réside dans l’énorme évolution qui a eu lieu en une cinquantaine d’année.  Les institutions étaient en perpétuelle évolutions alors que Rome devenait la plus grande puissance militaire et économique de la région. Les lignes de force de la vie politique actuelles ont été créée à cette époque. Le populisme et le calcul politique n’est pas une invention récente.

Remarquable.

8 août 2008 at 08:33 Laisser un commentaire

Eureka Street – Robert McLiam Wilson


Ne jugez jamais un livre à sa couverture.

C’est un précepte auquel j’essaie de me conformer. Lorsque je choisi un livre, je parcours le quatrième de couverture en diagonale et je lis une page – souvent la première – pour voir si j’ai envie de la tourner pour lire la suite. C’est un beau principe mais il est biaisé par nature: qu’est qui me pousse à ouvrir tel bouquin plutôt que tel autre? La couverture. On tourne en rond.

Ce préambule pour vous demander de ne pas vous arrêter à la photographie tristounette qui illustre le livre. Elle ne lui rend ni hommage ni service. J’avais eu ce bouquin en main plusieurs fois avant qu’on ne me l’offre. Je suppose que je ne l’avais pas acheté parce que rebuté par la couverture et le sujet. Je déteste les histoires qui me dépriment. Quoi de plus déprimant que des Irlandais célibataires qui dépensent le peu qu’ils ont à se beurrer dans des pubs minables pendant que la ville vit au rythmes d’attentats d’une guerre à laquelle je n’ai jamais rien compris?

Ne jugez jamais un livre à sa couverture.

Tout d’abord ce livre est très drôle. Au point d’éclater de rire en lisant certains passages. Avez-vous déjà éclaté de rire seul devant votre bouquin dans un train de navetteurs? C’est réjouissant, légèrement embarrassant et singulièrement trop rare! L’auteur a une plume qui me rappelle le Nick Hornby de Haute Fidélité. Les petits évènements de la vie quotidiennes deviennent burlesques. Les dialogues entre les protagonistes sont tendres ou acérés selon leurs affinités réciproques. McLiam-Wilson aime ses personnages. On  sent qu’ils sont pour lui plus que de simples rouages de son roman. Ils sont le roman.

Ensuite, ce livre est passionnant. L’attachement de l’auteur à ses personnages est contagieux. Nous avons envie de tourner la page pour savoir ce qui va arriver au pauvre Jake-le-coeur-brisé ou à Chuckie-plein-aux-as.

Enfin, ce roman vous force à regarder les actualités avec un autre oeil. L’action se déroule dans un Belfast accoutumé à la violence entre les groupes terroristes religieux. A l’imbécilité de l’administration. A l’horizon économique plat. A l’absurdité d’une guerre qui tient plus du banditisme que de la politique. Quasiment tous les personnages principaux ont grandi dans cette atmosphère de plomb. Tous ont une histoire qui est plus ou moins intimement aux évènements d’Irlande du Nord.

Au milieu du roman se trouve un court chapitre qui, bien que servant d’axe au récit, pourrait être lu indépendamment du roman. Il évoque la cruauté et l’absurdité d’un attentat terroriste. Ces quelques pages m’ont vraiment bouleversé. On est tellement gavé d’image d’attentats (Gaza: combien de morts aujourd’hui?) qu’on en oublie les vies brisées, la bêtise des auteurs. L’inutilité.

En tant que Belge, j’ai également beaucoup aimé la partie qui se déroule aux États-Unis. La manière dont les médias US relatent le problème irlandais est vraiment similaire à ce que les Français comprennent de nos problèmes communautaires. Il faut en retenir que les médias simplifient toujours! Rappelez-vous en lorsque vous verrez la prochaine émeute. La prochaine élection qui tourne mal, … Les médias font ce qu’ils peuvent mais on ne peut résumer l’histoire des frictions d’une nation en quelques images. Bien que nos problèmes soient nettement moins tragiques, ils ont des racines aussi anciennes. Comme en Irlande, nous payons des frustrations séculaires, des incompréhensions entretenues par quelques factions. Comme en Irlande, nous voulons juste profiter de la vie.

Un très beau cadeau.

4 août 2008 at 10:59 Laisser un commentaire

American Psycho – Brett Easton Ellis


American PSycho

American PSycho

Ce livre est vraiment un cas à part. Un bijou. Un diamant au tranchant dangereux. Une merveille pleine d’horreurs.

Il est très malaisé de relater l’intrigue sans dévoiler le mécanisme qui fait vraiment le sel du roman. Disons qu’il a le New york des années 80 pour cadre. Le personnage principal est un archétype du yuppie. Il est superficiel, riche, terrorisé.

American Psycho était un livre de commande: un éditeur a demandé à Brett Easton Ellis d’écrire un roman sur un serial Killer (sans doute pour surfer sur la vague Hannibal Lecter des années 90). Lorsque l’éditeur a lu le script, il a renoncé à l’avance versée à l’auteur car il n’osait pas publier un livre recelant des scènes aussi atroces. Ce livre a bien failli ne jamais être publié.

Je n’ai pas envie de parler des meutres tous plus horribles les uns que les autres pour la simple raison qu’il est difficile de départager le fantasme de la réalité. Les procédés stylistiques utilisés par l’auteur servent véritablement l’histoire et son propos. Le style devient de plus en plus chaotique et incohérent au fur et à mesure que l’intrigue se développe.

Les chapitres sont entrecoupés de critiques de groupes phares des années 80 qui ne feraient pas tache dans les Incrokuptibles. Ce qui s’avère déroutant la première fois que vous le lisez (mais qu’est-ce que ça vient faire ici ??) amplifie davantage le sentiment d’irréalité et rend la violence du récit plus horrible et improbable à la fois. A noter que la traduction est absolument remarquable: un texte qui repose autant sur les figures stylistiques doit représenter un défi de taille pour un traducteur.

Comme souvent lorsqu’un livre a du succès, il a été adapté pour en faire un film. Je le mentionne car je crois que c’est un cas d’école. Il démontre la différence fondamentale des deux médias. Le film dépeint un serial killer violent et psychotique alors que je suis absolument persuadé que ce n’est absolument pas le propos du livre.  Le film n’est pas mauvais mais c’est un peu comme dire que le chaperon rouge parle d’une petite fille imprudente. Le film est d’une superficialité affolante par rapport au livre. Totalement dispensable mais intéressant à comparer avec le livre après sa lecture.

Un véritable chef d’oeuvre. J’ai essayé de lire d’autres livres de Brett Easton Ellis. Ils me sont tous tombés des mains. J’ai vraiment la conviction qu’American Psycho est une oeuvre à part. Il ne s’agit ni de son premier ni de son dernir roman (Luna Park – Je ne suis pas arrivé au bout). Ce n’est ni un accident, ni un aboutissement. C’est un coup de génie.

1 août 2008 at 10:26 Laisser un commentaire


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